Le peuple doit défendre
ses lois comme ses remparts
... Héraclite
Le Président de
la République et le Gouvernement tentent de faire ratifier par
le Parlement le traité de Lisbonne, qui instituerait la
suprématie de l’Union Européenne sur les États d’Europe, malgré
le rejet par le Peuple Français du traité précédent en 2005. Les
partisans de cette procédure la prétendent constitutionnelle, et
allèguent l’intention avouée pendant la campagne électorale par
le président en exercice.
Ces assertions
sont-elles fondées ?
En démocratie, le
Peuple, formé par l’ensemble des citoyens, est le seul
souverain, et le pouvoir constituant appartient à lui seul. La
Constitution affirme ainsi, en son article 2, que « le principe
de la République est : gouvernement du peuple, par le peuple et
pour le peuple », et en son article 3 que « la souveraineté
nationale appartient au peuple ».
A chaque élection
législative, le Peuple souverain délègue partiellement le
pouvoir constituant à ses représentants, qui sont habilités à
modifier la Constitution, selon une procédure fixée par la
Constitution elle-même. Mais cette délégation implicite
n’habilite les représentants du Peuple ni à bouleverser la
Constitution, ni à l'abroger.
Or le traité que
le pouvoir exécutif tente de faire ratifier instituerait un
pouvoir supérieur à celui de la République, et un ordre
constitutionnel absolument supérieur à l'ordre constitutionnel
républicain. Il ne s'agit donc pas seulement de modifier la
Constitution mais de subordonner la République à un pouvoir
extérieur. Un changement si radical ne peut être accompli par
des représentants élus selon la procédure législative ordinaire.
Deux voies, et deux seulement, sont possibles :
- Soit le Peuple
exerce directement son pouvoir constituant, par voie de
référendum ;
- Soit il
l'exerce par l'intermédiaire de représentants spécialement
habilités, élus explicitement dans ce but, après une campagne
électorale toute entière passée à discuter de ce projet.
L'assemblée munie d’un tel mandat est alors officiellement
constituante.
Or les
parlementaires à présent en exercice n'ont pas été élus ainsi.
Donc le pouvoir constituant ne leur a pas été confié, et par
conséquent ils n'en sont pas dépositaires.
Le Président de
la République « est le garant de l'indépendance nationale» et
« veille au respect de la Constitution », selon l’article 5 de
celle-ci. Moins que quiconque il ne peut donc proposer de
l’altérer, encore moins de la subordonner à un autre texte
normatif. Mandataire du Peuple, sa volonté ne saurait prévaloir
sur celle du Souverain.
Les partisans du
traité proclament eux-mêmes que ce texte a été rédigé dans les
mêmes intentions que le traité de 2005, dont il reprend toutes
les dispositions principales et, presque phrase pour phrase, les
dispositions de détail, dont seul l’ordre a été modifié et la
présentation embrouillée. Semblables par le but, la substance et
la forme, ces deux textes sont essentiellement identiques.
Le traité de
Lisbonne est ainsi d’emblée caduc, puisque le Peuple souverain a
déjà décidé d’en refuser toutes les dispositions par sa libre
décision de 2005. Nul pouvoir n’étant au-dessus du Peuple, ce
que le Peuple a décidé ne peut être modifié que par lui.
Prétendre que des
mandataires sans mandat puissent violer la volonté des mandants,
prétexter du discours d’un seul homme, et d’un homme qui
enfreint délibérément le devoir de sa charge, pour renverser la
Constitution, c’est vouloir abolir la République et anéantir la
souveraineté du Peuple. C’est inciter au crime de forfaiture.
C’est déchirer le contrat social, détruire la foi publique,
ébranler la concorde civile, ruiner les bases mêmes de la vie
commune.
Selon l’article 4
de la Constitution « les partis et groupements politiques
doivent respecter les principes de la souveraineté nationale et
de la démocratie ». Toute personnalité politique qui accepterait
de ratifier ce traité se placerait donc d'elle-même hors de
l'ordre constitutionnel, comme les parlementaires qui, en 1940,
prétendirent accorder illégitimement, et à un seul homme, un
pouvoir qu'ils ne détenaient pas.
Pis encore, cette
usurpation résulterait, comme jadis, d’une pression de
l'étranger, approuvée par des groupes sociaux dominants prêts à
l’utiliser pour pérenniser leur domination.
Quiconque
ratifierait, ou tenterait de faire ratifier, ce traité perdrait
donc, par ce fait lui-même, tout pouvoir de représenter le
Peuple ou d'agir en son nom.
Si ce traité
était ratifié, les pouvoirs législatifs et exécutifs de la
France seraient ainsi caducs, et le pays n'aurait plus qu'un
parlement, un gouvernement et un président de fait, auxquels nul
citoyen ne devrait plus allégeance, jusqu'au rétablissement de
l'ordre constitutionnel républicain.
Vive la
République ! |