La
déclaration de politique générale du premier ministre a relancé le
débat sur la transformation de fond de la Vème
république. Pour certaines d'entre elles, les "évolutions" proposées
sont claires et ne posent aucun problème fondamental. C'est le cas
du renforcement des pouvoirs de l'opposition, encore que rien
n'interdisait jusqu'alors la majorité parlementaire à prendre en
compte les remarques et demandes de l'opposition, et aussi celui de
l'intervention "solennelle" du Président à l'Assemblée Nationale.
Mais pour d'autres, la position du pouvoir actuel reste floue.
Globalement, sans en référer auprès des Français et en proposant que
seuls nos élus nationaux soient en charge de l'essentiel, nos
gouvernants s'engouffrent dans une rupture constitutionnelle.
Fillon, le bras armé de
Sarkozy contre la Vème république.
Lors de son chat depuis
le site de Matignon, François Fillon a plaidé mercredi soir pour la
disparition, à terme, du poste de Premier ministre au profit d'un
"vice-président".
"La logique des
institutions que je souhaite, si on la pousse jusqu'au bout, c'est
le vrai régime présidentiel. On a un président de la République qui
dirige le gouvernement lui-même, mais en face, on a une Assemblée
beaucoup plus puissante, beaucoup plus forte, qui ne peut pas être
dissoute par le président de la République", a-t-il déclaré.
Mais d'expliquer : "la
France n'est pas aujourd'hui, me semble-t-il, prête à accepter un
système comme celui-là… Il faut sans doute d'abord faire un pas vers
un régime plus présidentiel, avec un Premier ministre qui reste le
coordinateur du gouvernement. Peut-être qu'un jour les esprits ayant
évolué, le pays ayant changé, on pourra aller jusqu'à un vrai régime
présidentiel et à ce moment-là, le Premier ministre devient un
vice-président."
Celui qui était présenté
comme un héritier du gaullisme social tire à boulets rouges sur la
constitution gaullienne. Et il oublie de préciser comment serait
désigné le vice-président…
La solidarité
gouvernementale vole en éclats
Quant à l'intention de
revenir sur un point essentiel de notre constitution : la solidarité
gouvernementale, il ne dit mot. En effet, depuis le 5 avril 2006 (convention
UMP relative aux institutions), Gaullisme.fr ne cesse de
dénoncer la manœuvre qui se prépare : un député nommé ministre
pourrait retrouver directement son siège au parlement en cas de
démission ou de "licenciement". Une telle règle régissait la IVème
république. De ce fait, il n'existait aucune solidarité
gouvernementale et les partis politiques régnaient sans partage. De
la "politiquaillerie" !
Et l'opposition
socialo-communiste va également dans ce sens. En dénonçant la
"juxtaposition" entre le projet présidentiel et celui de la majorité
législative, elle ne fait qu'alimenter cette tentative. Or, il est
indiscutable que la constitution actuelle, ainsi que les modalités
électorales, ont été ainsi édifiées pour donner à la France un
exécutif et un État fort. Et c'est ce que souhaite la très grande
majorité des Français.
Alain KERHERVE
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l'Edito n° 50